"Le kabuki, (théatre) vieux de quatre siècles,
est fait de trois idéogrammes
: ka, le chant, bu, la danse, et ki, la technique. Cet art singulier voit
le jour en 1603 à Kyôto : d’abord interprété par
des femmes dans la rue, il prend une autre dimension lorsque des hommes
endossent ces personnages féminins, les fameux onnagatas. Aujourd’hui
encore la tradition est respectée et tous les rôles du kabuki
joués par des acteurs masculins. Mais le kabuki est aussi une affaire
de transmission, de famille et de nom. La venue à Chaillot d’un
Danjûrô et d’un
Ebizô, de la famille Ichikawa, sans doute la plus importante à ce
jour, est à ce titre exceptionnelle : en effet, au printemps
2004, Shinnosuke Ichikawa VII, héritier du
nom d’Ebizô, est devenu Ebizô Ichikawa XI, dix-huit ans
après que son propre père a opté pour celui de Danjûrô XII.
Shinnosuke, star dans son pays aussi bien comme jeune acteur de kabuki
que de séries télévisées, reprend un titre
de la famille : « le nom d’Ebizô évoque
l’énergie et la sérénité ; c’est
un nom d’une
telle fraîcheur que, si l’on parvient à franchir une
certaine étape, un horizon encore plus large
s’ouvre devant soi », résume le jeune homme.
Cette prise de nom, désignée sous le nom de cérémonie
de la nomination pour Ebizô XI, constituera la seconde partie du
programme kabuki. Une première en Europe. Outre ce changement de
nom, l’acteur
adoubé doit assimiler le jeu de son prédécesseur à sa
façon et en porter haut les couleurs. Le nouvel Ebizô XI,
dans cette cérémonie Kôjô, pratiquera une série de mie et nirami, des gestes
et jeux de physionomie figés, propriété exclusive
de la famille Ichikawa. Autant dire que pour
les amateurs de cet art japonais, à la grâce indépassable,
le moment est attendu. Pour les néophytes, il s’agira alors de tenter
de percer un peu de ce mystère kabuki. D’ailleurs, l’affiche
parisienne va s’y employer : on pourra découvrir Toribe-yama
Shinjû ou
Double suicide à Mont
Toribe, plus théâtral, appartenant au genre « néo-kabuki » qui
s’attache à suivre la forme traditionnelle avec l’usage de
musiciens-narrateurs du style bunraku. Puis la soirée se finira dans le
frémissement de Kagami-jishi ou Lion au miroir.
C‚est une des « nouvelles 18 pièces principales de kabuki », créée par
Danjûrô IX en 1893. Le plus remarquable dans cette pièce de danse de
kabuki est que le même
acteur joue pendant la première moitié une gracieuse femme chambellan
Yayoi, et pendant la seconde moitié un lion viril. Le nouvel Ebizô a
joué ce rôle pour la première fois en septembre 1995 au Kabuki-za avec
un grand succès."
à 12:26